Séminaire d'Erin Manning. Lecture du chapitre La plage noire d'Edouard Glissant. Pendant qu'Erin lit à voix haute le texte en français, je suis les lignes sur mon écran. Je ressens une étrange dissonnance, désagréable. Attentive, j'en cherche l'origine, et comprends tout à coup : une dissociation se fait avec la musicalité de l'accent québecois d'Erin, et la musicalité de ma propre "voix intérieure", me révélant par la même mon propre accent (the frenchy one) !
Je change de tactique. D'abord lire et découvrir le texte seule, dans mon accent silencieux, puis écouter la lecture pour moi chantante d'Erin en français, puis cette même voix lisant la traduction anglaise. Trois expériences de lecture successives différentes, qui ne donnent plus cette sensation d'avoir été "dérobée" de quelque chose - de la découverte d'un texte, d'une d'écriture, d'un rythme. Je prends d'abord le temps d'y ajuster ma propre langue maternelle, ma propre musique. Écouter ensuite les variations singulières entrer en résonnance avec celle-ci, comme des mélodies en contrepoint, autant de couches, de strates, qui s'ajoutent au plaisir de la lecture - et de son partage - ouvrant à chaque fois de nouveaux chemins/tentacules de sens.
Je note cela à la volée, alors qu'une machine est en train de déchiffrer ce qu'Adam écrit, nous le transmettant de sa voix mécanique, monotone (industrielle?). Penser tout à coup à Stockhausen, ou à de la musique électronique expérimentale. Une autre manière de faire mélodie ? (Adam est un étudiant du séminaire autiste non verbal, qui s'exprime par le biais d'une machine lisant le texte qu'il tape).