Je trie, accumule, retrie, essaye de mettre de l'ordre dans mes lectures. Je suis coincée entre ma pratique quotidienne qui s'invente, qui dérape, stagne, reprend, comme un cheval compagnon que je maîtrise plus ou moins, avec sa propre volonté, son propre rythme- avec lequel je doit composer, et l'image idéale (idéalisée?) du travail de "chercheur" : avoir une base de données bibliographiques bien organisée, lire, faire des fiches de lecture, les retranscrire, les organiser, noter des idées puis écrire des articles, dans une organisation, une fluidité parfaite. Alors justement que je questionne cette modalité de recherche là, que je commence par le "faire". Mais trier des données bibliographiques, faire des fiches de lecture, c'est déjà du faire.
Je crois que le plus compliqué est que tous les choix à faire me reviennent : de la manière dont j'organise mes lectures, ce que je lis, dans quel ordre (comment je lis aussi), à la couleur ou au lignage de mon cahier de note. Dans cette tentative de mise en abîme, toutes ces pratiques, tous ces choix deviennent questionnables, parfois jusqu'au vertige.